Je me réveille de fort méchante humeur. Mal dormi, pour cause de voisins à la noix. Premier réveil vers 3h, je ne sais plus exactement pourquoi. Ah, si : un gros aboiement de chien tout près de ma tente. C'est ce chien-ci :
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(test légende) |
Puis de 06h30 à environ 07h, un réveil-matin bien puissant, qui re-sonne toutes les cinq minutes. Pratique. Même provenance que le chien. Puis d'environ 07h30 à jusqu'à ce que je mette des boules Quies, les enfants de la dame de la tente voisine (propriétaire du chien) parlent fort, sans qu'elle les fasse taire. Il fait beaucoup trop froid pour sortir de mon duvet, mais je dois le faire à chaque fois quand même, car le froid semble stimuler ma vessie.
Il fait moins douze. Je finis par dormir, mais à cause des boules Quies je n'entends pas mon réveil. Heureusement, à 09h15 le Génie toque à ma tenture.
J'ai la tronche fripée et plein de mots désagréables à la bouche. Je hais les gens qui amènent des enfants ou des chiens au stage, je hais les gens qui laissent sonner leur réveil en camping, je hais les gens qui laissent leur chien géant aboyer et aussi se balader dans un camping où il y a des tout petits enfants.
Une fois mon café absorbé, je ne grommelle plus. Après une tartine de nutella sur brioche, j'aime à nouveau mon prochain.
10h-12h premier entraînement !
Ça se passe très bien. L'échauffement est aussi sommaire que les autres années, mais la séance en elle-même est très bien. On a un prof d'Annecy, très pédagogue. On fait des révisions, mais il montre des détails qu'on oublie trop souvent.
La séance se termine par un petit debriefing, comme toujours. Plus le speech de début de stage, habituel lui aussi. Dans ce speech on nous fait l'historique de notre art, et on nous explique l'esprit et le fonctionnement des écoles de võ viet nam. Après le debriefing, étirements.
Cette année nous sommes une soixantaine, au fait. D'habitude c'est plutôt cent, mais les gens du võ viet nam arrivent de trois semaines au Vietnam, et donc certains n'ont pas eu assez de congés pour faire en plus cette semaine de stage.
Midi : très bonne bouffe qui réconforte, comme d'hab. Merci aux cuistots !
Puis vaisselle. On la fait par équipes de deux, c'est plus sympa comme ça. Comme on a mangé tard, pas de temps pour ma divine sieste. Il est déjà l'heure de se préparer.
16h-18h : 2e entraînement de la journée. Très sympa aussi. On fait des ateliers de 20 minutes : applications, puis armes (un beau tao de lance, jamais vu par nous (*)), puis acrobaties. C'est le truc que je n'aime pas faire, car dès que je ne vois plus le sol, même une fraction de seconde, j'ai la trouille. Mais aujourd'hui, à ma propre stupéfaction j'arrive à faire une roulade arrière, puis une roue (pourrie, mais une roue quand même). Pour finir, et grâce à l'aide musclée des deux profs-pareurs, je « fais » un flip (je crois) et même un salto arrière ! J'atterris tel une bouse tombée d'une vache, mais cette petite brèche dans ce que je croyais être un mur d'impossibilité est bien agréable.
Après le debriefing, les sept samouraïs et moi allons faire un petit entraînement en plus pour préparer notre démo de septembre.
Juste après, première baignade dans la Dordogne. Comme d'hab' j'y entre avec ma tenue, comme ça j'ai moins froid et ça la rince. Très agréable. Le monsieur qui pêche n'est pas très jouasse à mon passage, mais peu me chaud.
Long apéro...
puis le dîner est prêt. Youpi ! Une fois repu, je mets des grosse piles dans mon vieux guetto blaster et, accompagnés de quatre amis de la danse, je me dirige vers le terrain de pétanque, un peu à l'écart du campement. Nous commençons un cours de salsa à la bonne franquette, nourri de mes vieux souvenirs de salsero.
Nous venions de boucler le dilequeno et allions enchaîner sur l'enchufla quand surviennent l'ancienne et son époux, lui-même ancien (42 ans de pratique, je crois). Je vous le donne en mille : on se fait engueuler ! Par l'ancien. Il paraît que la danse ce n'est pas suffisamment important pour dépenser 5000 watts de lumière. Des mots plus durs sont également prononcés quant à la pratique de la danse en général. Je ne les répéterai pas ici.
Juste une chose : si la danse ça ne sert à rien, que dire des arts martiaux ?
Nous ne cherchons pas à argumenter. De toute façon, il nous ont coupé l'envie. C'est le couvre-feu, quoi. Pourtant on n'est pas en temps de guerre, que je sache. Et puis il y a des façons de parler aux gens, même quand on est un ancien. Ça me fait penser aux proverbes d'hier.
[Aparté que j'ajoute aujourd'hui, en décembre :
Il y a de nombreux rapports entre la danse à deux et les arts martiaux. Voici ceux auxquels je pense et qui sont exprimables par des mots :
- il faut au moins un partenaire.
- Un bon placement du corps et des déplacements précis sont la base indispensable.
- On recherche le geste beau
- Même s'il y a des façons de faire idéales, on doit avant toute chose s'adapter à qui l'on a en face.]
Déjà hier, quand j'ai appris que pour la démo de vendredi l'école de võ dan toc ne serait pas autorisée à présenter ses taos animaux (pourtant beaux) parce qu'ils ne sont pas dans le « tronc commun », j'ai plus que tiqué. Je peux accepter que, pour ménager les susceptibilités de tous, ne soient intégrées dans le tronc commun (de l'enseignement continu) que les techniques partagées par toutes les écoles, mais là c'est juste une démo, dans un camping ! Dès que les originalités sont gommées, ça m'inquiète. J'entends comme des bruits bottes se rapprocher. Ceci ne serait pas arrivé si l'un de nos profs avait été là, je suppose. Les organisateurs décident, c'est logique.
Tiquage aussi l'an dernier (ou celui d'avant ?), quand j'avais appris que lorsqu'on atteint un certain niveau technique, au võ viet nam on est forcé de devenir prof (sinon on ne vous enseigne plus rien de nouveau) et qu'on devait même signer un papier spécifiant cela. Un peu moisi, je trouve, de rendre obligatoire ce qui devrait être volontaire. Tout le monde n'a pas envie d'être prof. Et puis, avoir des tenues de couleurs différentes selon qu'on est prof ou pas, on a beau habiller ça sous les termes de « grand frères » et « petits frères », moi ça me confirme : gradés et troufions.
Ce soir, c'est le pompon qui fait déborder les poudres. Si les anciens représentent l'esprit du võ, il va falloir que je me trouve un autre art martial. Ou du moins un autre stage d'été, car au võ dan toc point d'écraseurs de joie. Nous avons nos propres problèmes, hein, mais pas celui-là.
[Note de décembre : ce que j'écris n'engage évidemment que moi. Mes camarades ne m'approuvent pas forcément.]
Bon, tout le monde est couché, il est minuit trente et je tapote encore, c'est pas sérieux. Et j'ai froid aux doigts, pour cause de temps de chien. Brossage de dents (si je retrouve ma brosse), enfonçage de boules Quies et bonne nuit les petits. À demain !
(*) « nous », c'est les gens du võ dân tôc. Nous huit, quoi.
Chroniques d'un stage de võ : lundi 16 août 2010